Les contraintes de la rénovation énergétique
On compte aujourd’hui plusieurs milliers de bâtiments classés en France. Travailler sur ces bâtiments signifie devoir faire face aux problématiques classiques de la rénovation mais également à des problématiques plus spécifiques, liées à la nature du bâtiment mais aussi à sa situation géographique.
Ces éléments du patrimoine disposent d’une identité qui est à la fois importante et contraignante à sauvegarder.
Publié le 17 mars 2025 par :
Aloïs
Consultant Energy Manager
Aloïs, expert de l’Energy Management, intervient en tant qu’auditeur énergétique pour la rénovation et le suivi de performance énergétique des bâtiments.
Dans un contexte de rénovation énergétique, ces bâtiments peuvent être source d’importantes consommations énergétiques. Ils sont donc un gisement d’économies d’énergies sur lequel il est nécessaire d’intervenir mais sujet à un contrôle rigoureux des Architectes des Bâtiments de France (ABF). Dépendant du ministère de la Culture, aucune rénovation n’est envisageable sans leur aval.
Les contraintes classiques de la rénovation énergétique
Une opération de rénovation doit prendre en compte l’ensemble du bâti traité. Cela va de sa forme, qui peut être singulière et donc représenter un challenge, à sa composition, tout en passant par son environnement.
On trouve donc des contraintes sur la morphologie du bâtiment. Les panneaux d’isolants ayant des dimensions spécifiques, un bâtiment à la forme singulière va exiger du travail supplémentaire. De même, un mur à la forme arrondi ne pourra être traité qu’avec des isolants souples capable d’épouser sa forme.
Concernant la composition de notre bâti, il existe des matériaux que l’on considère comme poreux et qui facilite le transfert de l’humidité de l’intérieur vers l’extérieur de notre bâtiment : on le dit perspirant. C’est notamment le cas de la pierre qui, pour une isolation, va nous imposer l’utilisation de matériaux permettant le transfert de cette humidité afin que cette dernière ne s’accumule pas. On proscrira ainsi les isolants synthétiques imperméables (polystyrène, polyuréthane) ou putrescibles (laine de verre).
Enfin, l’environnement de notre bâti peut également être une source de contraintes (températures hivernales, présence de voiries, énergies disponibles, etc). En effet, on préférera toujours réaliser les travaux d’enveloppe avant de changer notre production de chauffage et les études énergétiques d’aujourd’hui favorisent grandement le chauffage par pompe à chaleur. Bien que très économes, ces équipements ont un rendement qui chute lorsque les températures extérieures sont en dessous de 0°C. Au-delà de -7°C, vous courrez également le risque que votre chauffage ne démarre pas.
En guise de second exemple environnemental, dans le cas d’un immeuble donnant sur la rue, il ne sera pas possible de l’isoler par l’extérieur au RDC sous peine de dépasser sur la voirie. Les étages pourront cependant être traités normalement.
Les contraintes liées au patrimoine
En plus des contraintes énoncées, le traitement du patrimoine classé ou inscrit est plus pointilleux encore avec l’identité du bâtiment à respecter. Cette identité se traduit généralement par les matériaux utilisés lors de la construction (ou reconstruction). Il s’agit généralement de matériaux locaux pour l’époque (calcaire, ardoise, tout-venant, etc) associés à des menuiseries bois.
Dans ce cas de figure, le traitement des façades est très complexe car il est important de garder l’aspect initialement présent. Selon l’ABF responsable du site, un enduit ayant des propriétés thermiques peut être appliqué en façade. Normalement, ce type d’enduit (chaux-chanvre par exemple) est un traitement complémentaire à une isolation mais permettra d’obtenir des résultats probants malgré tout.
Un autre poste travaux pouvant poser problème est les menuiseries. Les configurations historiques possibles sont souvent des menuiseries en simple vitrage disposant d’un cadre bois. La complexité pour ces huisseries dépend fortement des demandes de l’ABF. Les exigences peuvent être nombreuses :
- Conserver le bois d’origine et remplacer les carreaux endommagés mais cela implique de conserver du simple vitrage
- Remplacer la menuiserie complète mais conserver la forme et la composition (conservation du simple vitrage ou passage en double vitrage selon l’avis de l’ABF)
- Remplacement de la menuiserie avec pour seule consigne de conserver la couleur d’origine
Ces possibilités peuvent donner lieu à des aberrations thermiques (mise en place de simple vitrage). L’avis de l’ABF est néanmoins primordial afin que vos travaux de rénovation puissent être validés, réalisés et réceptionnés.
Enfin vient la question des énergies renouvelables. En règle générale, la seule énergie verte compatible avec un projet patrimonial est l’installation de panneaux photovoltaïques. Les panneaux tels que nous les connaissons sont une solution assez discrète mais selon l’inclinaison de la toiture sur laquelle nous souhaitons les installer, ils peuvent être plus ou moins visibles et impacter l’identité de notre site. Nous n’aurons donc pas le choix de les installer sur des pans de toiture sous-optimisés en termes de production électriques mais dont la discrétion est assurée.
Ce qu’il faut retenir
Notre patrimoine historique représente un challenge dans nos objectifs de transition et de sobriété énergétique. Ces bâtiments sont souvent composés de matériaux ayant un comportement différent des matériaux modernes (béton, etc) et nécessitent donc une attention spéciale. Chaque poste de rénovation doit également être pensé afin de préserver l’identité du bâtiment (création de masques pour les équipements, etc).
Il est donc plus ardu de rénover ce type de site mais leur complexité permet la mise au point de solutions novatrices comme les tuiles solaires qui existent dans différentes teintes afin de respecter les coloris des couvertures mises en place selon les régions.